Les tunisiens découvrent le confinement, une mesure nécessaire pour enrayer la propagation du coronavirus. Mais qui dit confinement, dit aussi anxiété, lassitude et psychose surtout devant les nouvelles quotidiennes peu rassurante.
Comment gérer le confinement ? Tbibrouhek vous en dit plus.
LES CONSÉQUENCES PSYCHOLOGIQUES DU CONFINEMENT CHEZ LES CHINOIS
La Chine a été le premier pays à mettre en quarantaine ses citoyens pour éviter l’aggravation de l’épidémie.
Grâce à un auto-questionnaire en ligne, mené dans 36 provinces chez plus de 50 000 personnes, les chercheurs ont pu découvrir que pour 35 % des répondants, soit près d’un tiers, les résultats montrent un stress psychologique modéré, et même sévère pour 5 % d’entre eux.
Ce stress concernerait particulièrement les femmes, les travailleurs migrants et surtout les jeunes de 18 à 30 ans, ou les personnes de plus de 60 ans, en particulier dans les zones les plus touchées par l’infection.
Ça serait intéressant de faire de même en Tunisie.
COMMENT EXPLIQUE-T-ON LE STRESS DU CONFINEMENT ?
Le stress du confinement peut à la fois être lié à la peur de l’infection en elle-même, mais aussi à l’interdit et à la limite de liberté. À ce stress commun à tous, s’ajoute le manque de lien social pour les personnes les plus isolées.
D’après la revue The Lancet qui s’est intéressée à plus de 3 000 articles publiés sur les conséquences psychologiques du confinement (suite aux épidémies de SRAS, Ebola ou grippe A), plus la durée de confinement est longue (supérieure à 10 jours), plus les risques de symptômes post-traumatiques, de comportement d’évitement ou de colère sont importants.
Certains facteurs favorisent aussi le stress, comme le fait d’être enceinte, d’avoir des enfants, de craindre pour la distribution des biens de première nécessité, ou de ne pas recevoir d’informations suffisamment claires.
COMMENT PRÉVENIR LES CONSÉQUENCES DU STRESS DE CONFINEMENT ?
Prendre des nouvelles de ceux qui vivent seuls ou sont les plus isolés en les appelant régulièrement grâce aux nouveaux outils des réseaux sociaux.
Remercier et encourager ceux qui sont en confinement pour renforcer la motivation.
Créer des groupes de soutien et d’échanges sur le virus et les activités qui peuvent être faites pendant le confinement sur les réseaux sociaux. Les tunisiens ont déjà fait ça et plusieurs groupes facebook existent. Néanmoins, il faut faire attention aux fake news qui sont pourvoyeurs d’anxiété.
N’hésitez pas ainsi à parler de vos peurs et de vos angoisses avec vos proches et à vous changer les idées avec des activités ludiques, de relaxation ou même sportives à la maison.
Quand on sent la colère monter, que l’on devient plus impulsif, plus irritable qu’on ne pourrait l’être le reste du temps, à ce moment-là, il faut pouvoir changer de pièce, s’isoler, le temps de pouvoir souffler, prendre un petit peu de recul et baisser la tension.
Établir un emploi du temps de ce que vous allez faire dans la semaine, ne soyez pas devant une page vide. Parce qu’un grand vide est rarement pourvoyeur de belles choses. Pour les personnes qui télé travaillent, il faut faire un planning entre travail et autres activités.
Avoir un régime alimentaire équilibré et ne pas tomber dans le grignotage. C’est le moment d’apprendre à cuisiner de nouvelle recettes.
Il faut aussi bien dormir et se réveiller à la même heure tous les jours. Ne pas tomber dans un rythme inversé (dormir très tard et se réveiller très tard).
Essayez de réduire sa consommation d’alcool et de cigarettes et ne pas les utiliser pour gérer l’anxiété. On peut vite tomber dans un cercle vicieux.
Si vous avez un projet, des idées c’est le moment de vous concentrer dessus et de les développer pour qu’ils soient prêts à la levée du confinement.
Lisez des livres et faites du sport chez vous ce qui vous permettra de sortir un peu de la réalité anxiogène. Vous pouvez vous adonner à vos passions aussi.
Si vous avez des enfants, rassurez-les quant aux évènements. Ils perçoivent l’angoisse et l’anxiété aussi bien que vous et organisez pour eux des activités à faire tous les jours. C’est l’occasion de vous retrouver en famille.
Le maître-mot doit être de « s’adapter », avec le plus de réalisme et de souplesse possible. On ne peut pas dire ce qu’on deviendra la semaine prochaine, mais on deviendra forcément quelque chose. Enfin, n’oubliez pas que la peur est un sentiment contagieux, si vous vous sentez trop sensible aux informations les plus angoissantes, n’hésitez pas à limiter votre temps sur les réseaux sociaux ou les chaînes d’information en continu pour ne pas rajouter du stress au stress.
QUELQUES TÉMOIGNAGES
Un témoignage de Y.F résidente en médecine de famille qui est en auto-isolement depuis 1 semaine après son retour de France :
« Je suis en auto-isolement, depuis plus d’une semaine maintenant, mais comme je vis avec mes parents, on essaye d’avoir le moins d’interactions possibles. Je précise que je vis à l’étage, et mes parents et moi communiquons via les escaliers. Pour les repas, on me les fait monter à l’étage (en évitant tout contact direct, j’insiste beaucoup sur ce point), on met la nourriture sur un plateau, qu’on dépose sur une table à l’étage, et on redescend. A mon tour, je prends possession de mon repas, je m’alimente, et une fois mon repas terminé, je lave la vaisselle, tout de suite après avoir terminé de manger, sans oublier de mettre de l’eau de javel dans la bassine où je fais la vaisselle. Ce confinement est l’occasion de parler avec vos proches même via les réseaux sociaux ; on prend le temps de discuter, de rigoler mais la règle qu’on suit c’est de parler d’autre chose que de cette pandémie, ça nous aide à réduire notre stress et notre angoisse en rapport avec ce sujet. »
Autre témoignage de Nesrine, pharmacienne et confinée à Paris:
« Confinée depuis six jours maintenant, je ne sors qu’une fois tous les deux jours pour faire rapidement les courses. Certes, rester chez soi toute la journée est quand même difficile, surtout quand on vit dans un studio de 23 m² à Paris mais pour l’instant je vis bien le confinement. J’essaye de m’occuper comme je peux en dehors de mes horaires de télétravail. J’ai commencé par faire une liste de quelques livres à lire et que je n’ai jamais eu le temps de finir. Par ailleurs, Je suis un programme de home workout (une série d’exercices cardio de 20 à 30 min). Une légère poussée d’endorphines peut m’aider à me changer les idées, avoir un sentiment de satisfaction et de la motivation pour faire d’autres activités le reste de la journée. J’ai également profité d’une offre d’achat de cours en ligne à l’occasion de confinement pour reprendre des cours de photographie et pratiquer ma passion ! Et pour finir, je pense que le meilleur moyen pour faire passer le temps (en tout cas pour moi) c’est la cuisine !! Je teste de nouvelles recettes. A mon avis on peut joindre l’utile à l’agréable durant cette période difficile. L’idée c’est de se fixer des objectifs à atteindre en faisant des activités passionnantes ce qui peut rendre notre quotidien moins morose et moins stressant. »
Le témoignage de A.D de retour de France qui vit son confinement avec son fils :
« De retour de France, et étant donné que nous vivons avec maman qui a 72 ans, nous nous sommes enfermés mon fils et moi dans la même chambre pour éviter tout contact avec elle.
Comment vais-je passer 14 jours dans une chambre avec mon gamin de 10 ans, un enfant très actif, vif, curieux…? Cette question me turlupinait l’esprit!
Nous sommes à notre 5ème jour de confinement, et contrairement à mes appréhensions, ça se passe plutôt bien, car, et même si c’est très difficile pour un gamin, mon fils a compris l’importance de ce confinement et le respecte jusqu’à présent. Il faut dire aussi que mamie lui a réuni tout ce qu’il fallait pour l’occuper.
Nous passons donc nos journées à bouquiner, jouer aux jeux de société, PlayStation (durée déterminée à l’avance), livres de coloriage et de dessin (je m’en sers aussi ) et un stock de chocolat (avec modération); Maman, que Dieu la garde, nous dépose nos repas (vaisselle jetable) devant la porte de la chambre.
Les journées ne sont pas de toute tranquillité puisque, et c’est tout à fait normal quand on est enfermé H24, il arrive un moment où on sature, on s’ennuie, on tourne en rond, on devient agité, à fleur de peau, mais surtout, l’angoisse et les ruminations s’intensifient: est-ce que ça va finir un jour? Allons-nous revoir tous ceux que nous chérissons?
Ce n’est pas du tout facile d’être enfermé, surtout avec un enfant, d’être obligé d’éviter tout contact avec notre entourage, malgré tout le confort dont nous jouissons!
Cependant, il y a du positif dans cette situation imposée:
Nous recourons à ce confinement pour arrêter la propagation du virus, et donc protéger le plus de gens possible, mais aussi, et personnellement, et malgré toutes les tensions, je passe des instants uniques et privilégiés avec mon fils, nous partageons des discussions, des activités et des moments de tendresse qui nous rapprochent davantage et qui resteront certainement gravés dans nos mémoires. Vivement que ce virus disparaisse avec les moindres dégâts! »
Le témoignage de Moez, visiteur médical à Paris:
« Voilà maintenant une semaine que le confinement a commencé à Paris. Personnellement, j’ai la chance de ne pas être confiné seul, même si nous sommes dans un petit appartement parisien et qu’on manque de place mais la présence d’une autre personne est assez réconfortante. Durant cette première semaine, je n’ai pas eu le temps de m’ennuyer. Entre le télétravail et la cuisine la journée est déjà bien meublée, s’y rajoute une séance de sport quotidienne pour casser la sédentarité. Pour finir, pour casser l’ennui je me permets des moments de divertissements soit à travers des jeux vidéo ou des livres. Psychologiquement, le confinement peut peser surtout si on passe sa journée à suivre les médias, mon conseil c’est de multiplier les activités (formations en ligne, Netflix, sport, télétravail, cuisine, jeux vidéo) et minimiser les infos télévisées anxiogènes et dépressives, il ne faut pas laisser place à l’ennui. Il faut voir en ce confinement une opportunité de développement personnelle surtout avec les nombreuses formations en ligne et le temps libre à meubler. »
Enfin le témoignage de Meriem, consultante dans une entreprise et qui vit seule:
« Jour 1 : le premier jour de confinement était lourd, je me sentais inquiète de ce que pouvait faire le virus : plus de vie, des morts, des pénuries, une baisse d’activité de mon entreprise. Jour 2 : C’était plus le fait d’être seule qui me pesait, un sentiment de solitude couronné par un sentiment d’enfermement m’étaient difficilement supportables. Une baisse de concentration notable qui engendrait un stress supplémentaire car je n’étais pas en train d’atteindre mes objectifs au travail. Jour 3 : Je craque et m’effondre pendant un call et je décide qu’il faudrait que je change de lieu de confinement ou qu’un ami vienne me tenir compagnie. Jour 4 : je décide de me prendre en main et de voir les choses autrement. Je profite du confinement afin de pouvoir me recentrer sur mes objectifs, loin du brouhaha de la ville, et des transports en commun ; je prépare des plats sains, je lis et ne m’arrête pas de faire du sport. Jour 5 : Je dois m’adapter et mettre en place de nouvelles habitudes. Je fais du sport avec des amis via skype, messenger et je fais également des e-apéro. Jour 6 : Mon ami est là pour me tenir compagnie. Etre à deux pour s’épauler pendant cette rude épreuve facilite les choses. »
POUR RÉSUMER
Le confinement est un mal pour un bien et c’est une expérience partagée par tout le monde. Autant en tirer le positif que de rendre cette période plus anxiogène qu’elle ne l’est déjà.
L’équipe Tbibrouhek remercie tous ceux qui ont partagé leur expérience et vous invite au forum de tbibrouhek pour partager entre vous ces moments particuliers.